Actualité aéronautique

Où en est l'Akoya? Lisa Airplanes nous ouvre ses portes en Savoie

Article publié le 21 avril 2015 par David Barrie

Le fabricant de l'Akoya nous a accueilli sur son site au Bourget-du-Lac à quelques kilomètres de Chambéry. C'est Vanessa Troillard, sa responsable marketing, qui a accepté de répondre à nos questions.

L'avion présent dans le hangar de Lisa Airplanes n'est pas différent de l'Akoya que nous avions vu à Oshkosh. Vanessa Troillard nous le confirme : "Nous n'avons pas fait de grosses modifications aérodynamiques ou structurelles sur l'avion depuis qu'il vole. Ce sont surtout des optimisations. On a par exemple beaucoup travaillé sur le train d'atterrissage pour que l'Akoya soit plus maniable sur piste. Quelques surfaces extérieures vont encore êytre améliorées, mais pas radicalement changées sur le plan aérodynamique." Toutefois, les hydrofoils si emblématiques de cet appareil vont être redessinés. Lisa Airplanes a déjà testé la nouvelle mouture, mais préfère ne pas les montrer de peur d'être copié. Idem pour les flotteurs de saumon d'aile ; leur forme va évoluer légèrement pour être plus plaisante. Cela va aussi être le cas pour un certain nombre de surfaces qui équipera le premier avion conforme à la production. Malgré ces optimisations, les performances doivent encore être améliorées pour "gagner encore dix ou vingt pour cent sur certaines choses qu'[ils] annonçaient sur la plaquette." De ce fait, outre les hydrofoils, de nombreux essais d'hélices ont été réalisés, bien que le choix n'ait pas encore été arrêté. On aperçoit par exemple une hélice à six pales d'E-Props sur un mur du hangar. Mais finalement, le but d'obtenir la consommation attendue, 5,6l/100km, et la vitesse, aux alentours de 250km/h, devraient être atteintes lorsque l'avion de série sortira de leur usine. L'appareil est toujours propulsé par un Rotax 912, mais un moteur plus puissant, le Rotax 914 ou le UL Power, seront envisagés dans un second temps pour des clients ayant besoin de plus de puissance pour des utilisations particulières (en altitude par exemple).

Il leur reste donc des essais en vol à effectuer avant de pouvoir certifier l'Akoya. Le pilote d'essai, Gérald Ducoin devra faire des essais de vrille ou des décrochages en particulier. Tout n'est pourtant pas si simple. Aussi invraissemblable que cela paraisse, l'Akoya ne vole pas quand ils en ont envie. La piste de Chambéry leur est ouverte du mois d'avril au mois de novembre, quelques jours par semaine. L'hydrosurface, dans le prolongement de la piste de l'aéroport, est aussi ouverte de temps en temps, mais les autorités rechignent à laisser l'Akoya voler en été à cause des touristes. Si la météo et la disponibilité du pilote d'essai posent problème aussi, l'hydravion ne vole donc que très peu comparé à ce qu'il serait potentiellement capable de faire. Mais Vanessa Troillard tient à distinguer Gérald Ducoin : "Il est impliqué dans tous les choix qu'on fait. Quand il essaie l'avion, il faut qu'il ait confiance en l'Akoya et de par son expérience, son retour est important pour faire les bons choix."

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Depuis leur redressement judiciaire fin 2012, l'entreprise a trouvé un repreneur au début de l'année 2013. Alors que certains tablaient sur un investissement français (qui n'est jamais vraiment arrivé), ce sont finalement des Chinois qui ont mis la main à la poche en apportant quinze millions d'euros. Ces investisseurs, issus de Heima Mining, ont permis à la société savoyarde de reprendre une activité après la cession d'activité qui avait entraîné le licenciement de tous les salariés. L'activité a donc été relancée en avril 2013. Vanessa Troillard avoue que, même si les choses n'ont pas changé, il a fallu faire face aux différences langagières et culturelles : "Nous avons recruté une assistante de direction qui est d’origine chinoise, qui nous permet de faire l’interface, le lien,  avec nos investisseurs chinois et de mieux appréhender la culture chinoise qui comporte des différences assez importantes. Les Chinois ont investi parce qu'ils croient dans le potentiel de l'avion sur le marché mondial, mais aussi parce qu’ils croient au développement de l’aviation légère en Chine avec une ouverture du ciel potentielle." De ce fait, le marché potentiel pourrait être gigantesque pour la PME ; mais tout est à faire (réglementation, formation, infrastructures, ...) et le processus est long. Et sur le sol chinois, Lisa Airplanes prospecte des clients. Présent sur un salon régional en Chine, le fabricant a pris des contacts avec de nombreux acteurs locaux.

Concernant le reste de la clientèle, le constructeur annonce une centaine de réservations et de lettres d'intention pour son avion amphibie. Les clients viennent d'un peu partout dans le monde, mais l'Amérique du Nord représente toujours la majorité de son marché à l'heure actuelle. La réglementation y est moins coercitive qu'en Europe où les choses avancent à un rythme bien trop lent. Leur présence à Oshkosh depuis 2012 leur a permis de communiquer sur l'appareil, mais le processus est long : "Les gens à Oshkosh attendent que l'entreprise soit présente au salon quelques années consécutives pour qu'une confiance s'installe."

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Lisa Airplanes espère obtenir une certification américaine pour la fin de 2016 et livrer ses premiers avions dans la foulée. L'assemblage sera effectué sur le site de Savoie-Technolac, au moins pour la première centaine. Ensuite, l'entreprise n'exclut pas de doubler sa chaîne de production en ouvrant une seconde unité en Amérique du Nord, mais ne le cherche pas à tout prix : "Il faut que ce soit intéressant financièrement car cela représenterait beaucoup de coûts. Il faudrait doubler tous les outils de production, former les personnes, etc. Mais le but serait de palier aux coûts d'exportation et d'être moins tributaire du taux de change pour avoir un coût de revient en dollars." Tout dépendra de l'état du marché au moment de l'entrée en service de l'avion et des perspectives de vente à plus long terme aux Etats-Unis.

Pour une production en Chine toutefois, les choses sont nettement plus nuancées. L'avion étant tout en composites, les compétences ne permettent pas une production satisfaisante pour Lisa Airplanes : "Cela nous demanderait trop de travail et de ressources humaines, ce qu'on n'a pas à l'heure actuelle." Mais plus que les problèmes techniques et humains, c'est plutôt grâce son segment que l'Akoya demeurera en France : "On est sur un marché haut de gamme et le côté 'Made in Europe' apporte un vrai plus, comme pour les voitures de luxe ; Et puis, l'image de marque d'Airbus et de Dassault nous fait bénéficier de ce côté 'avion français', même si on n'est pas dans la même catégorie."

Quoi qu'il en soit, Lisa Airplanes veut demeurer une entreprise à taille humaine. D'une quinzaine de salariés à l'heure actuelle, ils devraient se retrouver aux alentours de trente lorsque la production sera lancée ;l les sous-ensembles venant de la région de Turin et de la région toulousaine étant pré-assemblés lors de leur arrivée à Chambéry, l'assemblage final ne devrait pas nécessiter un travail titanesque.

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Leur principal concurrent, l'A5 d'Icon, est prêt à être livré cette année et le constructeur californien ne lésine par sur sa communication. Vanessa Troillard ne s'en inquiète que relativement : "C'est un concurrent bien sûr, mais plus parce qu'ils font beaucoup de bruit et sont très forts sur leur communication que vraiment sur nos deux segments. De fait, ils deviennent concurrents de tous les amphibies. Mais nous n'avons pas la même clientèle ou le même type d'utilisation. C'est un avion de loisir et pour le 'fun' et ils ne n'ont pas cette notion de voyage. Nous n'avons pas non plus les mêmes performances en terme de vitesse ou de consommation, ni le même niveau de gamme. Et puis, même s'ils sont moins chers, tous les équipements que nous incluons en série sur nos avions sont en option chez Icon (ailes pivotantes, parachute, actionnements électriques, ...). Cela fait une grosse différence aussi en terme de masse à vide. Finalement, l'A5 nous est plutôt positif : Quand on demande à des clients américains comment ils nous ont connus, c'est souvent parce qu'ils ont fait des recherches sur l'A5 d'Icon et ont regardé ce qui se faisait d'autre." Bien que l'A5 soit bien moins cher (189000$ comme prix catalogue), l'hydravion californien a bien augmenté depuis son lancement où l'A5 était proposé à 139000$. L'Akoya avec ses 300000€ joue dans une autre catégorie. Cependant, le taux de change récent joue en sa faveur sur le marché nord-américain où il espère jouer un rôle majeur.

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Concernant le futur à plus long terme, Vanessa Troillard nous a avoué que Lisa Airplanes ambitionnait de construire un avion plus gros, n'entrant plus évidemment dans la catégorie des LSA : "On est une petite entreprise qui se développe à son rythme, mais on aimerait étoffer notre gamme d'avions." L'équipe de Lisa Airplanes n'a pourtant pas vraiment commencé à travailler sur un tel avion ni fait d'étude de marché. Aucune taille n'est encore avancée : "On ne sait pas si ce sera un quatre, six ou neuf places ... mais en gardant le côté multimodal de l'Akoya. Donc oui, il y aura un avion plus gros."

Il faudra d'abord que l'entreprise savoyarde livre ses premiers appareils dès la fin de 2016 après la certification de l'Akoya.

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