1er vol solo

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eaglefly
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# 26 janvier 2011 09:01
bonjour à tous,

en attendant un prochain récit d'éolien, est ce que vous pouvez me livrer, je veux dire
nous livrer l'histoire de vos 1er vol solo ?
j'aime beaucoup ces histoires car elle me font revivre le mien.

merci et bon rêve !
eaglefly

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Garenne12
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# 26 janvier 2011 10:00
ou des anecdotes sur des moments "chauds" qui auraient pu finir dans le décor mais qui finissent bien évidement.

Cordialement.
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eaglefly
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# 27 janvier 2011 14:03
personne n'aimerai nous faire pertager ses expériences ?

alors attendons éolien pour de nouveaux récits
eaglefly

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revan
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# 27 janvier 2011 15:47
http://www.planeur-aacm.net/recits/marcleonhart.php

le récit d'un ami

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wwwsilentwings.skyrock.com

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eaglefly
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# 27 janvier 2011 16:15
Beau récit, c'est un des premiers sur les vélivole que je lit, j'aime beaucoup ces récit

merci
eaglefly

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revan
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# 27 janvier 2011 20:27
http://www.planeur-aacm.net/recits/lache.php

dans le même style...

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eaglefly
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# 28 janvier 2011 13:33
beau récit (meilleur que le premier ^^) il sont vachement chouettes smile

bon vols
eaglefly

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nago
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# 28 janvier 2011 13:58
eaglefly, salut.
Tu vas te faire tirer les oreilles par ton moniteur....
(Par exemple, tu ne peux faire qu'un premier vol solo. Il faut donc écrire: votre 1er vol...)
Bonne fin de semaine!

(Dernière édition le 28 janvier 2011 14:05)

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eolien
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# 28 janvier 2011 14:45
Hi !.. Hi !... Hi !...
Je pense que dès son retour du Lycée, Eaglefly va dégainer et je sens venir un grand débat sur ce sujet...
Eolien wink
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eaglefly
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# 28 janvier 2011 16:04
oups ... abu de langage ... je voulais dire vos premiers solos ... c'est pour ne pas discriminer
les seconds vols solos smile

bon récits
eaglefly

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eolien
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# 29 janvier 2011 15:12
Seul dans la nuit...

En approchant de l’aérodrome, Auguste commença a ressentir les prémices du malaise qu’il ressentait chaque fois qu’il allait prendre sa leçon de pilotage. Il savait que ce témoignage douloureux d’un stress allait le suivre jusqu’à ce qu’il quitte la salle de briefing, puis disparaîtrait quand il prendrait place dans l’avion. C’était ainsi depuis le début, et il s’était accoutumé à ce défi physique que son âme lui imposait.

Auguste était mécontent de lui. Après plus de quarante heures d’entraînement, après des dizaines et des dizaines d’atterrissages, de manœuvres de toutes sortes, son niveau ne s’améliorait pas.
« J’en ai marre, je suis nul ! » s’était-il exclamé à la descente de l’avion, lors d’un vol précédent.
« Mais non, tu as fait beaucoup de progrès…. » avait essayé de le rassurer Louis, son instructeur, sentant venir un découragement qui, il faut bien le reconnaître, était assez justifié. Pourtant, depuis quelques séances, Louis était plutôt satisfait du niveau de pilotage de son élève, lui reprochant essentiellement ses hésitations, son manque d’esprit de décision dans les phases critiques, notamment à l’atterrissage.
« Auguste, lui avait-il maintes fois répété, je me moque que tu rates un atterrissage, ce qui m’importe c’est que tu identifies l’instant où c’est compromis et que tu décides et exécutes la remise de gaz… Si c’est moi qui prend la décision, si je te dis de le faire … tu le fais ! Et parfaitement bien ! Mais si je ne dis rien, tu persistes à vouloir te poser coûte que coûte…. C’est le seul point qui ne va pas ! »

Auguste avait ruminé et ruminé toutes ces remarques, tous ces conseils, mais une fois dans l’avion, il ne parvenait pas à les mettre en place. « Je me bloque, je suis mauvais, j’en ai marre !... »
Il voyait qu’il était trop haut ?... Il demandait : « Je dois descendre ? »
« Mais oui » répondait Louis.
S’il était trop rapide « Je réduis les gaz ?... » « Mais oui !... »
Je vois mes erreurs mais je n’ose pas prendre sur moi de les corriger… J’ai toujours besoin de son assentiment… J’ai peur de prendre une mauvaise décision… En fait j’ai toujours peur de prendre une mauvaise décision se lamentait Auguste.

Depuis quelques séances, Louis avait trouvé une amélioration et se disait qu’il allait falloir trouver le moyen de le lâcher pour son premier vol en solo. A l’aéro-club, lorsqu’il y avait un pot pour fêter le lâcher en solo d’un élève, il était gêné pour Auguste dont le sourire triste de circonstances contrastait avec les rires joyeux des autres pilotes. Il pesait chaque soir le pour et le contre, évaluant les risques, repoussant à chaque séance la décision, dans l’espoir que la prochaine serait la bonne. Mais il y avait toujours quelque chose qui n’allait pas. Trop de vent, une visibilité insuffisante, trop de trafic, ou une erreur de pilotage qui semait le doute. A présent, il sentait que s’il ne le lâchait pas, Auguste allait abandonner….

De son bureau, Louis vit la voiture d’Auguste arriver. Il aimait bien cet élève pilote, ce monsieur paisible, aimable, discret, qui avait voulu réaliser un rêve de jeunesse, et qui faisait de grands efforts pour vaincre ses peurs, ses appréhensions, ses doutes, ses difficultés.
Auguste resta quelques instant dans sa voiture, passa un coup de fil, posa le téléphone sur le siège, rassembla ses affaires, posa sa veste sur le téléphone, prit un blouson, et se dirigea vers l’aéro-club, un affreux pincement au creux de l’estomac.

Louis regarda la manche à air. Elle était quasi verticale, il n’y avait pas un pouce de vent. Il avait demandé à Auguste de venir tard, en fin d’après-midi, afin de profiter de cette période de la journée où les phénomènes aérologiques s’effondrent.
Le briefing d’avant vol fut rapide :
« Auguste, je te le répète, rater un atterrissage n’est pas un échec. Si tu as le moindre doute, remets les gaz !... Si tu le fais trop tôt, ce n’est pas grave, tu fais un tour de piste et tu te représentes …. D’accord ?... »
Auguste acquiesça en soupirant, et Louis savait qu’il était bien malheureux de n’être pas convaincu de répondre aux attentes de son instructeur.
Une fois dans l’avion, son malaise disparut, la boule douloureuse qu’il ressentait au creux de l’estomac s’estompa : il pilotait.
Louis le regarda faire correctement ses check-lists, mettre en route le moteur. Il fit très correctement son travail, dialoguant avec le contrôleur, vérifiant son moteur, s’alignant pour le décollage.
L’axe de piste fut correctement suivi, toutes les actions bien exécutées. En approche, Louis ressentit la tension de son élève et lui parla du prochain match de foot. Auguste répondit par une plaisanterie forcée et posa l’avion, roula et remit les gaz pour un autre tour de piste.

Le vent était calme, cette soirée d’automne était exempte de toute turbulence, l’avion glissait dans l’air frais sans un frémissement. Dans les vallées, une brume s’installait.
« Il y aura du brouillard cette nuit » commenta Louis, alors qu’Auguste reprenait son envol après un atterrissage encore réussi.
Louis hésita, il était tard, le soleil était bas sur l’horizon, mais il se dit qu’il risquait de ne pas retrouver de si tôt des conditions aussi favorables.
« S’il le pose bien, je le lâche » pensa-t-il, et Auguste fit un bel atterrissage. Au moment où il s’apprêtait à remettre les gaz, Louis lui prit la main et l’en empêcha. Il freina l’avion, lui fit faire un demi tour sur la piste. Il n’y avait plus personne en vol, le contrôleur avait quitté son service, le ciel était à eux.

« Louis, tu vas aller faire un tour tout seul. »
L’annonce fut comme un coup de poing dans le plexus d’Auguste qui soupira et eut le courage de ne pas refuser :
« C’est ce que je craignais … »
« Je sais, mais il faut y passer, tu vas faire un tour. Je te fais confiance ! La seule chose que je te demande, c’est de remettre les gaz si ça ne va pas. Dans ce cas tu refais un tour de piste et tout ira bien. N’oublie pas, en solo l’avion est plus léger… Il n’y a plus de contrôleur à la tour, alors tu fais la radio comme d’habitude, en auto-information. Je serai à l’écoute à la tour . Si tu as un souci, tu m’appelles..»
Avant de quitter l’avion, Louis vérifia que tout était en ordre, les volets et le compensateur en position décollage, la ceinture qu’il venait de défaire bien bouclée sur le siège désormais vide.
« Tu as trois heures d’essence, Bon vol !... » dit-il à Louis en souriant d’un air confiant et en refermant la porte du cockpit. Il se plaça en bout d’aile, fit un signe de la main, le pouce levé et regarda Auguste rouler vers le bout de piste, puis il gagna rapidement la petite tour de contrôle alors qu’Auguste décollait et passait en trombe les limites de l’aérodrome.

Louis s’installa dans le fauteuil du contrôleur, régla la radio et jeta un œil autour de lui. Le soleil, très bas sur l’horizon, était à présent masqué par une brume épaisse, et par certains endroits, on ne voyait plus les bois et les habitations proches de l’aérodrome.
Le brouillard montait des vallées beaucoup plus vite qu’il ne se l’était imaginé.
« Il faut qu’il se pose… et vite ! » pensa-t-il. C’était en fait une supplique. Il fut tenté de prendre le micro et d’appeler Auguste, mais la crainte de le perturber l’en dissuada.
Il voyait l’avion qui volait parallèle à la piste, ou, plutôt, il voyait son feu anti-collision qui clignotait dans le crépuscule précoce. Louis était anxieux. Il aurait voulu une belle lumière pour fêter l’atterrissage de son pilote et il n’y avait qu’une luminosité triste s’affaiblissant rapidement, les derniers rayons de soleil absorbés par les brumes et le brouillard.

Dans son avion, peu après le décollage, Auguste avait vite noté la dégradation de la situation. Partout, aux abords de l’aérodrome, les creux étaient remplis d’une ouate blanche, et seuls les sommets des petits vallons émergeaient encore, bien que déjà aux prises avec la brume.
« Il faut que je me dépêche… il faut que je me pose… vite ! »
Il commit alors une erreur lourde de conséquences. Pour gagner du temps il raccourcit sa trajectoire mais conserva son altitude. C’est d’un doigt tremblant qu’il prépara son avion pour l’atterrissage. Une fois aligné, il se sentit en difficulté, tous les repères habituels avaient soit disparu dans le brouillard, soit présentaient une image différente, aussi c’est d’un geste crispé qu’il mit l’avion en légère descente vers la piste qu’il pressentait plus qu’il ne la voyait.

Louis entendit Auguste s’annoncer en finale à la radio, et scruta le ciel. Dès qu’il le vit apparaître, il sut qu’il était trop haut, qu’il ne pourrait pas se poser. Il repoussa la tentation de lui dire de descendre, espérant une manœuvre de rattrapage du plan de dernière minute.
Auguste poursuivit son approche et lorsqu’il passa à la verticale du seuil de piste, il comprit qu’il n’avait aucune chance de se poser. Il prit alors la seule décision raisonnable et remit les gaz, remettant l’avion en montée pour refaire un tour de piste.
Dans le cockpit la radio se mit à cracher :
« Auguste, refais un tour de piste et ne vire pas trop tôt, fais comme d’habitude, ! »
« Il y a du brouillard partout, lui répondit Auguste, je fais au plus vite… »
« Tu as encore le temps, éloigne toi assez, tu étais trop haut » dit Louis en réalisant que son élève était bien placé pour le savoir.

En quelques minutes, le ciel s’était assombri, le brouillard gagnait de partout, on ne voyait plus le feu à éclats de l’avion. Un léger vent s’était levé, poussant traîtreusement le brouillard vers la piste, aggravant encore plus la situation.
Consciencieusement, Auguste s’annonça en finale. Tant qu’il était assez haut, il voyait la piste, comme un filigrane dessiné sous l’ouate grise. Louis ouvrit une baie et se pencha au-dehors mais c’est tout juste s’il pouvait entendre le bruit du moteur qui traînait à puissance réduite l’avion au-dessus du brouillard envahissant.
Auguste avançait et descendait au jugé, il n’était plus très haut quand quelques secondes auparavant un banc de brouillard lui avait masqué l’entrée de piste. Il avait poursuivi l’approche, au jugé, espérant retrouver rapidement des références visuelles.
Lorsqu’il vit la piste, par le travers gauche, il sut que c’était fichu, étant trop bas et trop décalé. Il remit les gaz pour la deuxième fois.
Louis le vit et l’entendit au même moment. Catastrophé, il regarda l’avion reprendre de la hauteur et disparaître rapidement dans le crépuscule.

Le brouillard envahit l’aérodrome et s’y installa en s’épaississant, sonnant le glas des espoirs de voir l’avion réussir à se poser.
Auguste vira à gauche, toujours en montée et comprit en se retournant que tout espoir de se poser sur son port d’attache était irrémédiablement perdu.
La luminosité ambiante lui permettait de discerner encore un peu ses instruments, et il se dit que n’ayant pas d’éclairage du tableau de bord, il en perdrait vite le contrôle.
Il regarda autour de lui. La terre n’était plus qu’une couverture uniforme grise, froide, hostile, et le ciel basculait dans la nuit. L’orient était déjà noir et l’occident gardait encore un peu de rougeoiement, le ciel au dessus de lui commençait à se décorer de quelques étoiles.
Il appela à la radio, voulu régler le volume mais son doigt qui tremblait en baissa malencontreusement l’intensité. Il ne put entendre Louis qui l’appela, l’appela, l’appela…
Auguste fouilla vainement dans ses poches à la recherche de son téléphone, afin de l’utiliser comme une lampe de fortune. Il l’avait oublié dans sa voiture…

Lorsque le bruit du moteur s’estompa, Louis compris qu’Auguste ne pourrait jamais revenir au terrain et qu’il était dans une situation épouvantable. Il trouva dans le manuel d’urgence le numéro de téléphone de la Brigade de Gendarmerie des Transports Aérien qu’il composa d’un doigt anxieux.
Dès qu’il eût l’officier de permanence, il se présenta, expliqua la situation, et posa la question qui le rongeait :
« Qu’est-ce que l’on peut faire ?... » espérant un miracle dans la réponse du gendarme.
« Je vais appeler la base militaire et voir s’ils peuvent identifier l’avion au radar et envoyer un hélicoptère… ou un avion »
« Dites leur bien que c’était son premier vol en solo… » insista Louis «…et que l’avion est en bois et toile… alors pour la signature radar…»

Affolé, dépassé par la situation, Auguste avait mis l’avion en palier, par pur réflexe et d’un geste brutal. Ne pouvant plus lire le compte-tours il avait réglé le régime du moteur à l’oreille, et il en était de même pour tous les instruments, l’obscurité ayant fini par les rendre illisible.
Il crut deviner être un peu haut et se mit en légère descente.
Heureusement, se dit-il, qu’il fait beau, j’ai une bonne référence d’horizon. Il avait la bouche sèche et les mains crispées sur les commandes de vol.

Il se pencha pour lire l’altimètre, et son effort de lecture pris du temps, un temps pendant lequel il déplaça inconsciemment les commandes de vol et perdit la notion d’horizontalité. L’avion s’inclina lentement, vira et commença à plonger. Quand il releva la tête, il réalisa que l’avion était parti dans une manœuvre qui allait l’entrainer dans une spirale mortelle. La masse de brouillard se précipitait vers lui, le vent sifflait, le moteur en surrégime hurlait, il reconnu les symptômes d’un virage engagé. Les leçons lui revinrent en mémoire, réduire les gaz, ailes horizontales, ressource souple. Il volait à nouveau en pallier.
Je m’en suis bien titré, mais personne ne le saura, pensa-t-il avec un mélange de satisfaction et d’amertume. Il s’essuya le front et repris son vol, l’oeil sur l’horizon.

Ses ailes s’illuminaient au rythme des éclats du phare anti-collision et ses clignotements le gênaient. Il décida de l’éteindre et chercha le contact à tâtons, le trouva, éteignit le phare et la nuit paisible lui apporta un réconfort.
Sous la couche de brouillard, les villages formaient des cercles lumineux, et il arrivait même, là où le brouillard était moins épais, à deviner les phares d’une voiture, une allée, une maison. Il n’avait aucune idée de l’endroit où il pouvait être. Il se rassura en pensant qu’il avait pour encore deux heures d’essence et que le moteur chantait sa mélodie sans une fausse note.
Puisqu’il pensait au moteur, il décida de tirer la manette du réchauffage du carburateur. Il fut tout étonné de voir que ses doigts ne tremblaient plus.

Que faire ? Il réfléchit. Après tout, se dit-il, si je me crashe à la vitesse minimale de vol, et si je ne prends pas un obstacle de plein fouet, j’ai une petite chance de m’en sortir. Il faut que je vole jusqu’à épuisement de l’essence, comme cela je ne risquerai pas de finir grillé comme ….
L’évocation d’une saucisse grillée le fit sourire et il s’étonna de trouver les ressources pour plaisanter avec lui-même alors que sa vie ne tenait plus qu’à un fil. Il se posa la question : Fatalisme ou inconscience ?... Il soupira et se concentra sur son pilotage.
Auguste repéra l’Ouest à la luminosité rémanente du ciel, et vira vers le Sud,. Dans la nuit claire, la masse de brouillard dessinait une ligne d’horizon bien définie, mais il savait qu’il tenait mal son altitude. Pour être plus précis dans son pilotage il décida de voler assez bas, mais pas une seconde il ne pensa que cela le rendrait invisible aux radars.
Il vit sur sa droite un large halo qui matérialisait une ville assez importante. Il s’en approcha, la survola, ne reconnu aucun indice et poursuivi son vol, toujours vers le Sud.

Le soleil avait à présent cessé d’illuminer l’Occident, et il n’avait plus rien pour se repérer. Quelle importance ? se dit-il, quand je vais devoir descendre, là ou ailleurs….
Plus la nuit devenait noire et plus il était difficile de discerner l’horizon. Il décida de descendre encore et c’est avec soulagement qu’en étant au ras de la couche de brouillard il constata une nette amélioration de la ligne d’horizon. Cependant, si d’en haut la couche de brouillard paraissait uniforme, à trop s’en approcher, il constata qu’elle était très irrégulière, avec des flammèches de brume qui s’en échappait. Auguste, d’une main souple pilotait son avion sur une trajectoire ondulante. C’eut été un jeu s’il n’avait pas été dans une telle situation.
Les minutes s‘enchaînaient aux minutes, et l’avion errait sous les étoiles, sans but précis.

Toute ma vie j’ai manqué de fermeté, j’ai laissé passer des bonnes affaires par manque de décision. En apprenant à piloter, ce défaut est venu gâcher le plaisir du vol. Pauvre Louis, s’il me voyait, errant seul dans la nuit… Je l’ai bien déçu, je l’ai compris. C’est un brave type et je ne pouvais rêver d’un meilleur instructeur. Pour un premier vol en solo, quelle guigne !... Je suis dans une situation effrayante… Pourtant, je n’ai plus peur. Au fond je me sens bien. Je vais peut-être mourir, mais je ne panique pas. Il regarda ses mains dans la pénombre, en leva une devant lui pour constater avec fierté qu’elle ne tremblait pas. J’ai franchi un cap. S’il me faut prendre une décision, je sais à présent que je la prendrai. Sans hésiter.

Louis avait appelé le président de l’aéro-club. Il avait accepté les reproches. Oui, il n’aurait jamais du lâcher un élève à une heure aussi tardive, oui, il aurait du prévoir la montée du brouillard. Tous ces reproches, il se les faisait., ce qui ne servait pas à grand chose dans l’instant. Il objecta des circonstances favorables qui étaient réunies et de l’exceptionnelle rapidité de la dégradation des conditions météorologiques. Il serait temps, plus tard, de l’accabler et de mettre un terme à son emploi. Louis pris comme prétexte qu’il devait appeler la gendarmerie pour rompre une discussion inutile.

L’officier de gendarmerie lui donna deux informations. Un hélicoptère allait essayer de décoller, et une alerte avait été lancé dans toutes les gendarmeries. Déjà plusieurs brigades avaient signalé avoir entendu le bruit d’un avion : on savait qu’il se dirigeait vers le Sud.
« Je prends ma voiture et je vais rouler dans cette direction, pour me rapprocher de l’endroit où … Notez mon numéro de portable et rappelez –moi s’il y a du nouveau »

La couche de brouillard n’était pas très épaisse et relativement mince par endroit. En en suivant les contours, Auguste n’avait pas conscience de ne voler qu’à quelques dizaines de mètres du sol.
Soudain, au sortir d’une mince pincée de brume éjectée de la nappe, il vit en face de lui une lumière rouge. Dans la seconde qui suivit il devina la structure d’un antenne relais vers laquelle il se précipitait. D’un violent coup sur les ailerons il bascula l’avion et tira sur le manche. Il frôla des câbles, des haubans, l’avion grimpa à la verticale et sa vitesse s’effondra. En voyant le pare-brise de l’avion envahi d’étoiles Auguste eut le bon réflexe de mettre plein gaz tout en poussant sur le manche. Le dôme étoilé bascula et l’avion se retrouva en palier.

Auguste n’eût pas trop le temps de s’émouvoir sur la collision qu’il venait d’éviter car tout à coup, devant lui, le brouillard disparut. A droite et à gauche, suivant une ligne assez droite, la marée grise laissait la place à une immense étendue noire parsemée de rares lumières.
Auguste n’hésita pas longtemps et poursuivit sa route, vers ce qu’il pensait être le Sud.
Il survola quelques villages quand il remarqua devant lui un chapelet de lumières. Il arriva très rapidement sur les lieux :
« Une autoroute !... » s’exclama Auguste.
Il vira et vola en longeant l’autoroute. Il y avait beaucoup de circulation et les phares des voitures venant de face se suivaient en un interminable serpent lumineux.
Ne pouvant lire l’heure il se posa la question de l’autonomie restante. La file de voiture qu’il suivait était moins dense, et il y avait des trous entre les feux de positions rouges des voitures et des camions.
Il prit spontanément une grande décision :
Je vais atterrir sur cette autoroute… décida-t-il. C’est ma seule chance. Je voulais attendre la panne sèche, et bien je change mon projet et je vais me poser sur l’autoroute dès que je trouverai un trou dans le trafic ! Ce serait trop bête de tomber en panne d’essence alors que j’ai une chance de pouvoir atterrir…»
Il descendit dans la nuit pour se positionner sur la droite de l’autoroute et observa attentivement le tracé sinueux, cherchant un segment de ligne droite dégagé de véhicules.

La sonnerie du téléphone tira Louis de ses pensées. L’officier de gendarmerie l’informa qu’un hélicoptère avait décollé et se dirigeait vers une zone où des témoignages donnaient à penser que l’avion était passé par là…
Auguste scruta l’autoroute qui était toute droite sur environ deux kilomètres. Au moment où il dépassait ce tronçon, le brouillard réapparut. Il fit demi-tour et reprit son vol en longeant en sens inverse l’autoroute, toujours observant cette partie de ligne droite pour essayer d’identifier des lignes à haute tension, ou d’autres obstacles. Il ne remarqua rien.
Auguste vit au loin les feux de position de l’hélicoptère.
Ils me cherchent, pensa-t-il. Il alluma son phare anti-collision et ses ailes s’illuminèrent en séquences. Il hésita. Fallait-il suivre cet hélicoptère qui l’entraînerait surement vers un aérodrome dégagé de tout brouillard ? Fallait-il le suivre et prendre le risque de tomber en panne sèche en rase campagne ?
Non, décida-t-il, je vais me poser sur l’autoroute. Il éteignit le feu à éclats qui le gênait et engagea la descente vers l’autoroute.

Les choses se compliquèrent lorsqu’il ne fut plus qu’à une dizaine de mètres de hauteur. Les yeux écarquillés, il doubla une voiture et se positionna derrière un camion. Il descendit encore et réduisit sa vitesse. Il arriva au niveau du camion et fut pris dans des remous violents. L’avion était balloté et Auguste avait beaucoup de mal à conserver une trajectoire acceptable.
Les turbulences empirèrent alors que l’avion volait à basse vitesse, rendant le pilotage incontrôlable. Auguste remit les gaz, prit de la hauteur et fit demi-tour pour une nouvelle tentative.
Il tourna en rond, laissant passer voitures et camions jusqu’à ce qu’une trouée dans le trafic lui permettent de se représenter pour une nouvelle tentative.
Il repéra un espace entre deux voitures. Si j’arrive à doubler la voiture de tête, je me pose…
L’avion descendit, doubla une voiture et se trouva devant un espace vide. Auguste eût des difficultés à bien apprécier la hauteur, descendit, réduisit les gaz alors que les barrières de sécurité défilaient sur les côtés. Dès qu’il fut au sol, il freina, priant le ciel que les automobilistes arrivant derrière lui le voient assez tôt pour s’arrêter.

Dès que l’avion fut arrêté au beau milieu de l’autoroute, Auguste coupa le moteur, et fit rapidement ses procédures. Il ouvrit le cockpit et respira l’air frais de la nuit. Il aurait voulu rester là à récupérer de ses émotions mais le bruit des voitures roulant en sens inverse était très inconfortable et le rappelèrent à l’incongruité de sa situation. Il s’était posé, de nuit, sur une autoroute…
Ce n’est qu’en quittant l’avion qu’il remarqua les véhicules qui s’accumulaient derrière lui. Je vais faire un sacré bouchon, jubila-t-il
Il leva la tête et vit l’hélicoptère qui orbitait au-dessus de sa position.
Des personnes qui avaient quitté leurs véhicules s‘approchèrent, toutes éberluées d’avoir vu se poser un petit avion d’aéro-club, sorti de la nuit noire et de je ne sais où, pour atterrir devant eux à leur plus grande stupéfaction.
Auguste interpella les badauds ;
« Aidez-moi à pousser l’avion sur le côté, on va dégager une voie ! » ordonna-t-il.
Il conseilla les volontaires, leur dit où et comment pousser et l’avion fut vite rangé en biais sur le côté.
Auguste remonta dans l’avion et chercha dans son blouson un petit carnet. Il demanda aux personnes qui l’entouraient si quelqu’un pouvait lui prêter un téléphone.

Louis roulait en proie a des pensées affreuses lorsque son téléphone sonna.
« Louis ?... C’est Auguste … »
« Auguste ! … s’exclama Louis, au comble de la stupéfaction. Mais où es-tu ?... »
« Je me suis posé sur l’autoroute », annonça Auguste, et cette déclaration lui procura une grande fierté.
« Tu es blessé ?... »
« Non, rien, je n’ai rien !... »
« Et l’avion ?... »
« Rien non plus, rien de cassé… Je pense qu’on va le déplacer pour permettre la circulation… Si tu voyais le bouchon !... »
Des sirènes se faisaient déjà entendre, des gyrophares filaient en convergent vers le point d’atterrissage.
Dès que les gendarmes arrivèrent, Auguste prit les choses en main.
« On fera la paperasse plus tard. Il faut dégager les voies en priorité. On me dit qu’il y a une aire d’autoroute à deux kilomètres, je vais remettre en route et rouler jusque là-bas. Vous me suivrez avec vos véhicules »
Le plus gradé appela ses supérieurs et revint confirmer l’autorisation. Auguste lui proposa de monter avec lui et c’est avec un passager qu’Auguste roula sur l’autoroute avant d’aller garer son avion sur le parking poids lourd de l’aire de repos.

Louis arriva sur les lieux après deux heures de route pendant lesquelles ses pensées s’entrechoquèrent. Comment Auguste avait-il pu survivre. L’avion n’était même pas abîmé. C’était incroyable, stupéfiant !... Mais comment avait-il fait ?...
Il trouva Auguste attablé au milieu d’une foule de gendarmes et de personnes, buvant le café en répondant à mille questions.
Auguste se leva dès qu’il le vit pour aller à sa rencontre. Ils se serrèrent longuement la main, partageant une forte émotion.
Un peu plus tard, Auguste demanda à Louis de le suivre :
« J’ai une question à te poser... » Il le regarda dans les yeux « Dis moi, Louis, si je reviens tu me reprendras comme élève ?... »

Récit fait à la va-vite et bien évidemment totalement imaginaire...
Eolien

(Dernière édition le 29 janvier 2011 18:47)

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eaglefly
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# 29 janvier 2011 20:02
Bonsoir éolien,

Il a beau être imaginaire, ce récit est magnifique (le rêve de chaque pilote débutant ?)
Quand Auguste se met à avoir confiance en lui, pourquoi ? C'est la peur, la sensation
d'être seul à pouvoir trouver une solution ?
Le truc bizarre, c'est comment un élève "débutant" arrive à se repérer, à s'orienter dans
la nuit, le brouillard...
Vraiment sympathique cette histoire smile

Bonne lecture.
eaglefly

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Vector
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# 29 janvier 2011 22:33
Un grand bravo à l'imagination d'Eolien... peut-être un peu stimulée par des expériences vécues.
Une seule question : Auguste a-t-il pensé à rallumer son strobe avant de se poser sur l'autoroute ?

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eolien
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# 29 janvier 2011 22:49
Hi ! ... hi !...
Non, ça l'aurait gêné pour l'atterrissage !... Mais il aurait effectivement dû le rallumer une fois posé ...
On mettra ça sur le compte de l'émotion du pilote et de l'étourderie du rédacteur ... tongue

Bon, fort heureusement, rien de vécu ! Que du roman. Je n'ose pas imaginer ce qui se passerait si un pilote se retrouvait dans de pareilles conditions pour son lâcher... sad
Quoique, après tout... pourquoi pas ?... L'homme s'adapte à tout !

Pour Eaglefly : on en parlera demain ! Mais chacun peut imaginer ce qu'il veut...

Bien amicalement,
Eolien

(Dernière édition le 29 janvier 2011 22:52)

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Vector
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# 30 janvier 2011 00:23
Remarque pour Eaglefly,
Il est relativement facile de s'orienter de nuit lorsqu'il y a des repères lumineux et un horizon bien défini. Sinon, sans éclairage des instruments et du compas, je ne crois pas que la situation de notre malheureux Auguste aurait connue un dénouement aussi satisfaisant !
En fait, avec un compas et une bille aiguille, on peut voler "aux instruments" pendant un certain temps (pas très long), à condition de piloter avec une extrême délicatesse, en évitant d'engager un virage et surtout qu'il n'y ait pas trop de turbulence.
J'ai particulièrement aimé la "tenue d'assiette à l'oreille" : un vrai BUZZ, n'est-ce pas Eolien.
Et un grand bravo à Auguste pour son sang-froid.

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