Actualité aéronautique
Farnborough 2012 : Quelles solutions pour un roulage automatisé ?
Article publié le 14 juillet 2012 par David Barrie
Parmi toutes les possibilités offertes pour tracter des avions automatiquement, AeroWeb-fr.net vous propose d'en découvrir trois qui semblent les plus prometteuses, TAXIBOT, EGTS de Safran-Honeywell et WheelTug.
De plus en plus d’entreprises proposent au salon aéronautique de Farnborough des solutions permettant de faire rouler les avions jusqu’au seuil de piste sans l’utilisation des moteurs. Les procédés que nous avons trouvés sur les stands du salon ont tous une philosophie complètement différente. A chacune des solutions ses avantages et ses inconvénients. Cependant, les clients ont déjà exprimé leur préférence. Voici trois façons de faire qui reflètent le moyens mis en place pour se passer de tracteurs.
TAXIBOT
Commençons par la solution la moins exotique, même si les technologies mises en place sont de pointe. La société israélienne TAXIBOT propose simplement un tracteur … démuni de conducteur. Toutefois, les responsables de l’entreprise présents au salon nous ont livré qu’un chauffeur demeurerait, tout du moins pour commencer, dans le poste de pilotage du tracteur. On imagine mal les aéroports laisser un engin automatisé de quarante tonnes élancé à cinquante kilomètres par heure sans surveillance humaine.
Si sur le papier, tout semble simple, c’est bien plus compliqué lorsqu’on creuse un peu. TAXIBOT a développé un « berceau » où la roulette de nez vient se loger comme sur un tracteur ordinaire. La nacelle a entièrement été redessinée et est incrustée de technologies permettant au tracteur de "comprendre" en temps réel ce que fait le pilote dans son cockpit. C’est bien le pilote qui guide le tracteur jusqu’en seuil de piste. Il utilise TAXIBOT comme si c’était sa roulette de nez. Lorsqu’il tourne à gauche, le robot fait de même en activant des moteurs électriques qui font tourner les roues du tracteur. Quand le pilote freine, TAXIBOT ne freine pas … Les freins ne sont utilisés qu’en cas d’urgence. A la place, le tracteur "sent" que le pilote ralenti et met ses moteurs au point mort. Le pilote utilise les freins du train principal et ralentit comme s’il le faisait avec des réacteurs allumés.
Le conducteur du tracteur a quand même un rôle. C’est lui qui repousse l’avion de la porte de l’aérogare. De plus, lorsque TAXIBOT tire un Airbus, un câble lie les deux entités et le conducteur doit le débrancher avant le décollage. Enfin, il doit ramener le véhicule par les voies de côté, souvent utilisées par les forces d’intervention.
La société a déjà effectué de nombreux tests et prévoit de fournir des entreprises spécialisées et des compagnies aériennes. Des essais se sont déroulés à Francfort par exemple avec Lufthansa et Airbus.
Les responsables de TAXIBOT estiment qu’en dix-sept minutes de roulage, un 747 consomme une tonne de carburant et rejette plus de deux tonnes de gaz carbonique. TAXIBOT espère aussi faire réduire les files d’attente dans les grands aéroports du monde. Pour un monocouloir le ratio est encore plus important avec plus d’une demie tonne pour un quart d’heure de roulage.
L’engin sera équipé de deux gros moteurs diesel et deux moteurs électriques pour l’inclinaison des roués. A plus long terme (mais pas tant que ça selon un des deux représentants de la compagnie), TAXIBOT espère développer un système base sur des piles à combustible.
On peut difficilement comprendre la nécessité d’un chauffeur dans le tracteur, obligeant les opérateurs à déployer une main d’œuvre relativement nombreuse. La toute automatisation est peut-être la prochaine étape sur le calendrier de TAXIBOT et ferait plus de sens.
Voici une vidéo illustrant le mécanisme:
Safran – Honeywell : EGTS (Electric Green Taxiing System)
Le système développé par le partenariat formé entre Safran et Honeywell contraste fortement avec Taxibot. Cette fois, le constructeur a décidé de greffer au train principal un moteur approvisionné en énergie par l’APU de l’avion. Encore une fois, les moteurs ne sont pas mis à contribution dans le but d’économiser du carburant. Seulement, quand on regarde de plus près le procédé, il semble énorme et être très lourd. Du côté de Safran, on nous certifie que l’ajout de ce moteur supplémentaire ne pèse que cent cinquante kilogramme pour chaque train. Cela représente tout de même une masse cumulée de trois cents kilogrammes, ce qui, sur un monocouloir représente une charge marchande en plus non négligeable.
Safran explique avoir choisi d’incorporer le système sur le train principal pour éviter des problèmes de fatigue des matériaux si cela avait été installé sur le train avant.
Mais comme pour TAXIBOT, les moteurs ne sont allumés qu’à quelques mètres du seuil de piste, avant de décoller. Le pilote peut aussi reculer après l’embarquement et n’a besoin d’aucune aide. Il pilote l’avion comme s’il roulait avec les moteurs allumés.
Enfin, et tous les constructeurs ont mis l’accent sur ce point, les dommages attribués à des objets tiers seront réduits fortement.
Grace à leur système, Safran et Honeywell s’affranchissent du tracteur. Cependant, la mise en place sur le train principal les oblige à développer un mécanisme complexe du fait de la présence des freins.
Safran ne s’est pas exprimé sur les clients potentiels qui pourraient demander à s’équiper de cette solution.
WheelTug
La dernière société que nous vous proposons se prénomme donc WheelTug. Le système reprend un peu des deux mécanismes décrits ci-dessus. WheelTug utilise un moteur électrique monté sur un train d’atterrissage, mais le place sur la roulette de nez plutôt que sur le train principal.
"Nous remplaçons la roue et nous mettons une nouvelle roue contenant un moteur", explique Jan Vana, directeur de WheelTug.
Comme pour l’Electric Green Taxiing System de Safran-Honeywell, le pilote est autonome avec son avion. WheelTug a aussi conçu un boîtier en partenariat avec la société Gables, où le pilote contrôle la vitesse et peut mettre en marche un régulateur de vitesse. Cela permet d’économiser non seulement du carburant, mais aussi les freins ; le pilote n’a pas à s’en servir pour lutter contre la puissance des réacteurs.
Le constructeur revendique déjà deux cent cinquante avions qui se verront doter de ce système. WheelTug espère parvenir à une certification FAA (puis AESA) d’ici la fin de 2013, pour une mise en service immédiate. Parmi les clients ayant déjà signé chez WheelTug, on compte par exemple Onur Air, Israir mais aussi de gros transporteurs tels que Jet Airways (Inde), El Al (Israël) ou Alitalia. WheelTug est en discussion avec plusieurs compagnies aériennes de par le monde. Nombreux sont les clients qui veulent des créneaux de livraison rapides, même de grands transporteurs européens.
Tout d’abord, WheeTug va se concentrer sur les monocouloir d’Airbus et de Boeing, parce que le système a déjà été testé sur ces avions et surtout car le marché potentiel est énorme. A plus long terme, le procédé pourra être agrandi pour des long-courriers ou réduits pour des jets régionaux. Le mécanisme n’a besoin que d’un APU assez puissante pour le faire tourner.
Mais comment WheelTug réussit à insérer un moteur si puissant qu’il peut tracter un monocouloir dans une simple roué d’avion ? Le directeur nous explique que l’entreprise (dont les locaux se trouvent à Baltimore aux Etats-Unis) a tout conçu à partir d’une feuille blanche. Quarante brevets ont été déposés. Le système repose sur un moteur à induction incorporant un aimant non permanent.
WheelTug affirme qu’un seul moteur dans la roulette de nez est plus que suffisant. La société précise qu’ils n’ont pas voulu toucher au train principal qui est beaucoup plus complexe et aurait entraîné une augmentation de la masse à cause des freins (qui génèrent aussi de la chaleur, que le WheelTug ne tolère pas vraiment). Grace à cela, WheelTug ajoute autant que l’EGTS de Safran et d’Honeywell, mais sur une seule roue ! Là où l’EGTS en entier pesait trois cent kilogrammes, on se retrouve seulement avec cent cinquante ici. WheelTug déclare que la consommation supplémentaire entraîné par cette masse accrue est regagnée en quatorze minutes de roulage. Dès la quinzième minute, le gain est immédiat.
Nous n’avons toujours pas parlé du coût d’acquisition et d’opération du système. Et c’est là que réside aussi la surprise. Il a fallu que M. Vana répète ses propos que je croyais avoir mal compris. WheelTug fournira gratuitement son mécanisme à l’acquisition et le louera aux compagnies aériennes pour zéro euro. Je me suis pendant quelques secondes qu’il se moquait de moi avant de m’apercevoir qu’il ‘avait pas encore fini sa phrase.
La société gagnera de l’argent en récupérant la moitié des économies que le système aura permis de réaliser. WheelTug d’appuiera sur de nombreuses données pour savoir combien les compagnies auront gagné grâce au WheelTug. C’est toutefois une forme de loyer mais qui établit un contrat où les deux parties sont gagnantes et engrangent plus de bénéfices, ou en tout cas moins de pertes.
Néanmoins, des problèmes se posent. Installer un moteur sur la roulette de nez peut créer des soucis au niveau de la fatigue de la structure. WheelTug nous certifie que des analyses sont en cours, mais que l’impact demeure dans les limites fixées par la FAA et l’AESA.
Avec son système, WheelTug compte faire économiser annuellement cinq cents mille à huit cents mille euros par avion, pour un 737 NG ou un A320 respectivement, en comptant les économies de carburant, les coûts de ravitaillement au sol, les dommages évités, le temps où le moteur est utilisé au sol, etc ... Si les comptes de WheelTug sont corrects, le marché pourrait s’avérer être juteux pour cette petite compagnie.
Voici ci-dessous une vidéo montrant les tests effectués sur un 737 de Germania :
Pour conclure, TAXIBOT est impressionnant pour sa propension à tracter des gros porteurs tels qu’un A380 ou un 747. Cependant, il n'est pas certain qu’il soit adapté pour des plateformes parfois démunies de gros tracteurs où Ryanair ou AirAsia se posent par exemple. Le système de Safran et d’Honeywell bénéficie de l’expérience de ces deux sociétés qui mettent l’accent sur ce point pour se démarquer de la concurrence ; mais attacher un moteur sur chaque train paraît surdimensionné quand on voit que WheelTug réalise la même performance avec un seul moteur sur la roulette de nez. Enfin, des trois projets, c’est bien celui de WheelTug qui semble aussi le plus abouti et qui pourra être le plus adapté aux compagnies aériennes, principales victimes de l’accroissement du prix du pétrole dans l’industrie aéronautique. Il faudra voir dès la fin de 2013 si, à l’usage, le système ne pose pas de problème de maintenance pour ses opérateurs.
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