Actualité aéronautique

Farnborough 2012 : NG Aircraft veut construire un Fokker de nouvelle génération

Article publié le 15 juillet 2012 par David Barrie

L'appareil prénommé F120NG sera plus grand que le F100 et consommera beaucoup moins grace à l'ajout du PW1217G de Pratt & Whitney. Mais les choses n'en sont pas là et NG Aircraft cherche encore des financements pour lancer son avion.

En arpentant les allées du salon, on passe parfois devant des stands aux projets dont on sait qu’ils ne verront jamais le jour. Les exposants viennent trouver des investisseurs au salon et repartent parfois déçus de leurs échecs.

En me rendant sur le stand de TAXIBOT pour un entretien, je suis passé devant le carré hollandais. Sur le côté, j’ai entraperçu un Fokker 100 en maquette avec des winglets. J’ai levé la tête et ai lu sur la devanture "NG Aircraft". Interpelé, j’ai demandé à la personne sur place si je pouvais repasser pour en savoir plus ; rendez-vous pris pour l’après-midi.

Vers quinze heures, pendant le meeting et les rugissements du F-18 au-dessus de nos têtes, j’ai donc rencontré Henry Marsman et Willem (Will) van Breda, tous deux responsables au sein de NG Aircraft et anciens ingénieurs chez Fokker du temps des F70 et F100. L’équipe de NG Aircraft, auparavant Rekkof (l’inverse de Fokker),  est composée d’une dizaine de personnes à l’heure actuelle ; ils était presque tous déjà collègues il y a vingt-cinq ans, la majorité étant issue de Fokker.

 

Le but est simple : Le Fokker 100 était un excellent appareil, on pourrait le remettre au goût du jour et en faire un concurrent sérieux aux jets régionaux actuels et à venir.

Le F120NG (c’est son nom) est largement inspiré du Fokker F100. A l’origine, NG Aircraft pensait équipé le jet néerlandais d’un moteur de nouvelle génération, tout simplement serais-je tenté de dire. Puis, au fur et à mesure que l’équipe réalisait des études, il devenait clair que d’autres modifications nécessaires simples et assez peu coûteuses pourraientt faire gagner quelques points au niveau de la consommation en carburant.

NG Aircraft s’est dirigé vers le Geared Turbo Fan (GTF) de Pratt & Whitney. Plus précisément, dans la gamme de puissance que propose le motoriste nord-américain, la société hollandaise a choisi le même moteur qui équipera le Mitsubishi Regional Jet. Seulement, puisque le nouveau moteur est plus lourd, l’avion avait tendance à cabrer vers l’arrière. Il a donc fallu qu’ils rallongent la cabine d’environ cinquante centimètres à l’avant de la voilure et déplacer les issues de secours situées à l’arrière. Et grâce à cet allongement, le F120NG a pu accueillir cent vingt passagers là où le Fokker F100 n’en avait que cent. Vingt passagers avec cinquante centimètres de plus ? Oui, c’est possible. En plus de l’allongement du fuselage, NG Aircraft  utilisera des sièges très fins, de nouvelle génération, comme on en trouve sur les CSeries, MRJ et autres nouveaux jets régionaux. Les sièges seront espacés de trente pouces (76 cm), comme cela est le cas dans la majorité des avions de cette catégorie.

Grace à ce moteur et la position de celui-ci sur l’avion, le bruit émis par l’appareil devrait être bien inférieur à ce que feront les concurrents, même les derniers jets conçus.

Pour s’accommoder de ce moteur plus volumineux, un troisième point d’accroche sera créé sur le Fokker en plus des deux déjà existants. Les mâts réacteurs verront leur aérodynamisme entièrement redessiné et les nacelles moteur seront refaites pour prendre en compte le PW1217G.

La suite avionique sera aussi révisée. Cependant, NG Aircraft veut garder la même philosophie pour ce cockpit que pour celui du F100, mais en le faisant bénéficier des dernières avancées dans ce domaine avec de grands écrans frontaux par exemple.

Concernant l’aile, elle sera conservée en l’état avec quelques débroussaillages aérodynamiques. De plus, des winglets seront ajoutés, similaires en forme à ceux des 737 NG ou aux Sharklets d’Airbus. Grace à ce procédé, l’avion réduira sa consommation de deux à trois pourcents et améliorera ses performances sur les terrains en altitude et par fortes chaleurs. De ce fait, l’avion aura un rayon d’action accru.

Enfin, malgré un moteur plus lourd, NG Aircraft ne prévoit pas de renforcer le train d’atterrissage. Sur le Fokker F100, celui-ci était certifié jusqu’à cent cinq mille livres (47.5 tonnes).

f120ng

Sur le papier, l’avion est tentant. La masse à vide est estimée à 25.6 tonnes, ce qui est seulement trois tonnes de plus que le MRJ (qui a trente passagers de moins) et trois tonnes de moins que l’ERJ-195 d’Embraer à capacité équivalente. NG Aircraft précise avoir les mêmes coûts que d’autres jets régionaux, mais un coût par siège bien moindre, d’où un bénéfice potentiel plus important. On peut le comprendre face à un Embraer 190, mais difficile d’être aussi affirmatif à ce stade du développement face à un CSeries ou un MRJ, dont les rayons d’action sont bien plus importants aussi. De plus, NG Aircraft effectue tous ces calculs avec un trajet de quatre cents milles nautiques. Bien que cela corresponde sûrement à une moyenne ou à une demande des clients, ce n’est pas le boulot pour lequel les compagnies ont payé pour acquérir des MRJ ou des CSeries. 

Pour les essais en vol et parce que l’investissement serait trop important, NG Aircraft a décidé de ne pas construire un F120NG neuf d'entrée mais a préféré utiliser le prototype du Fokker F100 originel pour le modifier, rallonger le fuselage de cinquante centimètres, installer des winglets, monter les nouveaux moteurs et les mâts, … Ce premier exemplaire, encore à l’état de prototype sera prêt, si tout se passe comme prévu, dans deux ans et demi. Les essais en vol et la certification démarreront au début de 2015. L’avionique ne sera pas installée sur cet appareil dans un premier temps. Puis, l’avion sera immobilisé une seconde fois pour y incorporer la suite avionique et installer la nacelle moteur définitive. L’entrée en service de l’appareil est prévue pour 2017.

M. Marsman nous a certifié que la conception de l’avion était terminée à hauteur de 95%. Les essais en soufflerie doivent être effectués afin de valider les calculs, mais l’avion tel qu’il est présenté est presque tel qu’il sera produit. La cabine par contre est loin d’être gelée et ne le sera pas tant que le lancement officiel ne sera pas intervenu. NG Aircraft est bien sûr à la recherche d’investisseurs. La société batave est en discussion avec des pays. Nous n’en saurons pas plus. A cause des sommes engagés, il leur faudra de nombreux partenaires puissants. Si une chaîne d’assemblage final sera présente sur le territoire néerlandais, les deux dirigeants se sont montrés embarrassés lorsque j’ai évoqué un éventuel partenariat avec l’Inde ou la Chine : "L’inde ou la Chine ? Nous ne savons pas encore … mais il y aura une chaîne aux Pays-Bas. Il est possible que nous soyons amenés à le construire ailleurs, comme le font Embraer ou Airbus. C’est une question de bon sens." Ayant aperçu ma surprise lors de leur embarras, ils ont toutefois désiré préciser que rien n’était fait et que leur réponse n’impliquait pas que leur avion serait produit dans un des pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine).

 

M. van Breda dit que NG Aircraft est en discussion avec de nombreuses compagnies aériennes, européennes et australiennes principalement : "Les compagnies sont impressionnées et nous demandent de commencer rapidement à produire l’avion. Mais avant de prendre une décision, elles veulent être sûres que nous serons un programme viable à long terme, pour des décennies. De grosses compagnies ont manifesté leur intérêt pour l’avion. Elles nous disent : 'Si vous êtes là en 2017, vous pourrez compter sur nous.' C’est le même avion que le F100, mais en mieux. Ca titille leur intérêt."

C’est là que risque d’être le problème : NG Aircraft a grand besoin de financement pour mener à bien son projet. Quand M. Marsman a été questionné sur le coût d’une telle mise à jour du Fokker F100, il s’est montré très vague, évoquant les mêmes coûts que pour les concurrents. Difficile à évaluer donc. La Chine a son propre programme aéronautique et accueille déjà de nombreux avionneurs et équipementiers. NG Aircraft pourrait plutôt se tourner vers le Brésil où un savoir-faire existe déjà ou vers l’Inde qui cherche à lancer un programme civil.

C’est un projet intéressant, mais qui pourrait bien finir, comme de nombreux autres faute d’investisseurs, aux oubliettes dans un marché en plus où l’offre en jets régionaux devient de plus en plus, voire trop, diversifiée.

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